Néron

 

NÉRON (Lucius Domitius Nero Claudius)

Néron, cinquième empereur romain, naquit à Antium le décembre 37 de notre ère et mourut près de Rome le 11 juin 68.
Il était fils de Domitius Aenobarbus et d'Agrippine. Sa mère Agrippine, après avoir épousé l'empereur Claude, sut persuader ce dernier d'adopter Néron, au mépris des droits légitimes du jeune Britannicus. Burrus, que ses talents militaires rendaient cher aux soldats, et le philosophe Sénèque furent chargés de l'éducation du jeune Néron, qui parut d'abord avoir profité des leçons de ces maîtres illustres. Reconnu empereur après la mort de Claude (54), il commença son règne par des mesures équitables, abolissant les taxes onéreuses, diminuant la récompense accordée aux délateurs, montrant, enfin, des vertus qui faisaient présager au monde une ère de paix et de félicité. Il parut vouloir consoler les Romains du règne de Tibère. Dès le second jour de son règne, il alla au sénat, et, dans un discours que Sénèque lui avait composé, il annonça que son projet était de prendre Auguste pour modèle. En effet, les commencements de son règne ressemblèrent à la fin du règne de celui qu'il se proposait d'imiter. Il se montra juste, libéral, affable, poli, complaisant, accessible à la pitié. Burrus lui ayant un jour présenté à signer une sentence qui condamnait deux criminels à mort : " Que je voudrais, s'écria-t-il, ne pas savoir écrire ! "
Mais bientôt il laissa éclater sa perversité naturelle. Sa mère, l'impérieuse Agrippine, dont il voulait secouer la tutelle, l'ayant menacé de faire rendre le trône à Britannicus, il fit empoisonner le jeune prince (55).Néron ne s'arrêta plus dans la voie du crime et de la tyrannie. Il se plongea dans les débauches les plus infâmes, fit assassiner sa mère (59), répudia son épouse Octavie, tua lui-même d'un coup de pied sa concubine, la courtisane Poppée, s'entoura de pantomimes et d'histrions et se livra avec passion aux jeux du cirque. Ayant entendu un jour un de ses familiers se servir de cette exclamation, proverbiale à Rome : " Que le monde brûle quand je serai mort! " Néron répliqua : " Et moi, je dis qu'il brûle et que je le voie ! " Après un festin extravagant, il fit mettre le feu aux quatre coins de Rome, pour jouir d'un spectacle qui rappelât la sublime horreur de l'embrasement de Troie. On raconte que, monté sur une tour, à la lueur des flammes et au milieu des cris de désespoir des fugitifs, il chantait, en s'accompagnant de la lyre, un poème qu'il avait composé sur les désastres d'Ilion. L'embrasement dura neuf jours ; les plus beaux monuments et dix quartiers de la ville furent réduits en cendres.
Il ne manquait plus à ce forfait que de le rejeter sur des innocents : Néron en accusa les chrétiens et, sous ce prétexte, excita contre eux une persécution, la première et l'une des plus violentes dont l'histoire fasse mention (64-68).
Alliant le ridicule à la cruauté, il se croyait, comme il le dit en mourant, un grand artiste, et il se donnait en spectacle sur les théâtres, où il fallait l'applaudir sous peine de mort. Le chant était sa passion favorite. Il se fit décerner ainsi jusqu'à 1.800 couronnes.
Une conspiration fut formée par Pison, un de ses favoris, et par les premiers personnages de Rome ; trahis par un esclave, les conjurés périrent dans les supplices, et Néron en prit occasion de verser des torrents de sang. Pétrone, Thraséas, Corbulon, Sénèque, Lucain et une foule d'autres citoyens illustres furent immolés.
Vindex, gouverneur de la Gaule Celtique, et Galba, gouverneur de l'Espagne, firent révolter leurs provinces ; bientôt une partie de l'empire reconnut Galba pour empereur ; le sénat de Rome, les prétoriens suivirent cet exemple, et Néron, abandonné de tous ses partisans et proscrit par un décret public, se fit donner la mort par un de ses affranchis (68) en s'écriant : " Quel artiste le monde va perdre !
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